
Bon, on commence à s’habituer à rouler à gauche, même dans les ronds-points ! Quelques difficultés encore pour regarder du bon côté en traversant la route… La tête des enfants quand on crie à gauche, alors que ça fait 3 mois qu’on leur dit à droite !!! Jamais contents ces parents.
On a eu plus de mal à se faire à l’Angleterre. Arrivée à Harwich pas enthousiasmante : beaucoup de circulation dans les rues et les routes étroites et mal entretenues, des voitures roulant vite et souvent mal (on serre les fesses), des maisons décrépies, pas de pistes cyclables, campings plus que rares, des entrepôts abandonnés, des magasins fermés aux vitrines poussiéreuses, des détritus partout (notamment au bord des routes) et des dépôts sauvages des panneaux d’affichage et des clôtures défoncées, beaucoup de terrains en friche… Méchant contraste après le Danemark. Un Anglais nous explique que les routes ne sont pas entretenues faute de crédits. Un Suisse croisé dans un camping et connaissant bien l’Angleterre nous parle d’une région en « sous-développement », en dehors Londres même. Et c’est vraiment l’impression que ça donne, du moins dans les parties urbaines : les infrastructures existantes se dégradent, tout apparaît sale et délabré, hormis quelques quartiers privilégiés avec leurs maisons proprettes. Et puis, des caméras de surveillance dans tous les coins, des barbelés, des peintures anti-escalade, des milices de voisinage. L’image d’une société malade, qui ne s’aime pas.
A l’inverse, les Anglais sont généralement charmants et très accueillants. A Sittingbourne, le 30 juillet, nous dormons même dans le jardin de quelqu’un chez qui nous étions simplement allés chercher de l’eau. La veille, après Gravesend, c’est dans un centre équestre et pépinière où, une fois passée la porte grillagée et le Rotweiler mis à l’écart, le propriétaire nous ouvre un champ bien volontiers et nous offre des cerises (au grand bonheur de Lila, des chevaux partout !). Trois jours plus tôt, à Maldon, ce sont des cultivateurs qui nous proposent gentiment un bout de terrain en herbe près de leur habitation. Leur fils, qui a fait un grand voyage de la Russie à la Nouvelle Zélande, vient nous voir le soir avec une bouteille de vin et nous buvons un verre ensemble sous le Tarp (il s’est mis à pleuvoir juste après le montage des tentes) dans le jour qui finit. Le lendemain matin, il nous ramène même une carte des pistes cyclables du comté, qui nous servira bien pour traverser le secteur de Basildon, très peuplé (même si les pistes cyclables en question sont souvent très symboliques).
C’est l’anniversaire de Pascal, nous lui offrons une bouteille de porto et des pistaches, il est ravi. Elle ne fera pas long feu, soit disant ça fait du poids, c’est cela oui…
La campagne est nettement plus agréable et préservée que les parties urbaines. En ce moment, les colzas et les blés sont mûrs et tous les champs sont d’un jaune qui contraste joliment avec le vert des arbres et des haies. En faisant abstraction de la quantité impressionnante de lignes électriques qui barrent le paysage. Le temps est mitigé, de petites pluies de temps en temps, mais rien de très méchant. Avec les nuages, de belles lumières. En fait, il n’a pas plu vraiment ici depuis 5 semaines, l’herbe est sèche et la terre extrêmement dure – pas facile de planter les sardines, on n’en utilise que le strict nécessaire.
Pas grand-chose pour le vélo, à part le « National Cycle Network » développé petit à petit par Sustrans depuis une quinzaine d’années, mais on croise beaucoup de « Public footpath », aussi bien en ville qu’à la campagne. Certains passent même carrément en travers des champs cultivés.
Après Maldon, nous restons deux nuits à Tilbury pour faire l’aller-retour en train jusqu’à Londres, que desservent pas moins d’une dizaine de compagnies ferroviaires. Beaucoup de monde et d’activité dans cette grande ville, beaucoup beaucoup de voitures et de bruit aussi. Bien contents de n’y être pas en vélo, les cyclistes ici (et il y en a, à la sortie des bureaux) sont carrément suicidaires, plus encore qu’à Paris. Du Tower Bridge, un bateau nous emmène à Westminster sur la Tamise, le parcours est très chouette. Nous revenons à la gare en bus, en choisissant les lignes pour prendre ceux à étage. Entre autres curiosités londoniennes, des petits cars jaunes aux airs de véhicules de brousse, amphibies, qui promènent les touristes dans les rues et sur le fleuve.
Le camping de Tilbury est assez folklo, c’est aussi un « musée » (dépotoir serait plus juste) d’engins agricoles et routiers anciens. A part nous, il y a quelques caravanes de gens qui y habitent manifestement à l’année et travaillent dans le coin. Le « camping » précédent, le seul entre Harwich et Colchester, était particulier lui aussi, peuplé de caravanes et de vieux mobil homes plus ou moins à l’abandon, à l’arrière d’un vague magasin agricole et de grandes serres en verre désaffectées. Le champ où nous plantons la tente est juste occupé par une famille en vacances (?) et une jeune femme en caravane dont c’est visiblement la résidence. Avec leur côté déjanté, ces campings sont bien sympa tout de même.
Après les pontons mouillés, les rails de chemin de fer dont je vais me méfier dorénavant : grosse chute pour moi, le vélo n’a rien mais je ne suis pas très fraîche en me relevant ; je tombe dans les pommes et comme je suis seule, pas très simple pour repartir, je crois que les Anglais m’ont pris pour une ivrogne, du coup personne ne s’arrête… n’importe quoi, comme si j’avais l’haleine et la démarche d’une ivrogne !
Depuis Harwich, nous suivons plus ou moins les pistes à vélo, la 51 puis la 1 à partir de Colchester, qui fait partie de la « North Sea Cycle Route » (une des 12 routes du réseau Eurovélo), jusqu’à Dover, et enfin la 2, qui continue le long de la côte (ou la 19, qui passe plus dans les terres, on verra). Ces routes sont visiblement peu utilisées, et pas plus entretenues que l’ensemble du réseau routier. La route 1 en particulier, quand elle ne suit pas la route des voitures, emprunte des voies diverses et parfois improbables voire inquiétants : chemins en bord de champ (ou carrément à travers), hauts de digues enherbés, friche industrielle entre deux grillages, ruelle étroite et déserte bordée d’entrepôts désaffectés, piste militaire… Les portiques qui protègent l’entrée des parties réservées aux vélos ne laissent pas passer les nôtres, avec leur chargement et avec la remorque. Alors on décharge, on décroche, on passe, on raccroche, on recharge, on râle un coup, et on recommence 200 mètres plus loin. La moyenne en prend un coup ! Mais au moins, et sauf certains passages sur des routes passantes ou étroites ou en ville, la route est à peu près sûre. Et nous fait découvrir des endroits variés. Elle est assez bien indiquée, même si parfois le tracé sur le GPS (téléchargé sur Internet) s’avère bien utile.
A Tilbury, le petit bac (où ne passent que piétons et deux-roues) nous permet d’éviter le grand pont qui traverse la Tamise un peu plus loin. Pas de touristes ici, uniquement les gens du coin. D’ailleurs, Gravesend, sur la rive en face, est tout sauf touristique… Nous choisissons ensuite de continuer sur la route qui fait le tour du Kent, plutôt que de couper direct vers Portsmouth. Et, si la sortie de Gravesend est un peu laborieuse, ensuite nous ne le regrettons pas, passant dans des endroits très chouettes, jusqu’aux falaises crayeuses de la côte sud-est. Les villes portuaires que nous traversons au passage, Whistable, Rochester, Dover, ne sont guère plus folichonnes que celles du côté de Londres. Quelques-unes sont un peu plus touristiques comme Sandwich ou Deal, avec ses pavillons tout au long de la grande plage de galets. Nous arrivons dimanche soir (1er août), après moult montées et descentes, au petit camping pour tentes de Folkerstone, qui surplombe la mer et la plage au pied de la falaise. Les enfants se font plaisir et ramassent une quantité impressionnante de morceaux de verre de toutes les couleurs polis par le ressac.
Photos sur Picasa :
– Esbjerg – Tilbury
– Tilbury – Folkestone